jeudi 10 juillet 2014

La croissance est morte ? Vive la décroissance !

Alors que la crise augmente en intensité et en déclarations diverses, les politiques de tous bords nous présentent leurs solutions miracles pour relancer la croissance. C’est l’objectif dont le bien-fondé ne se discute pas, c’est le postulat de base, l’évidence des évidences…

Et même si les projections européennes de croissance oscillent entre 0,1% et 1% pour les plus optimistes soufflant pieusement sur les braises du feu éteint, aucun n’émet l’hypothèse iconoclaste que la croissance n’existe plus, et qu’elle pourrait avoir bel et bien disparue.   

C’est parce que le moteur du modèle occidental dans lequel nous vivons depuis plusieurs générations est basé sur la croissance. Elle a forgé nos consciences, bercé nos rêves, structuré nos raisonnements et fait désormais partie de notre ADN… L’idée qu’elle puisse disparaître un jour est à ce point inconcevable, blasphématoire, et du domaine de la science-fiction, que seules quelques voix osent évoquer la possibilité d’un monde dans lequel la croissance ne serait plus. 

Car les conséquences de sa disparition, sont non seulement économiques et sociales, mais elles sont surtout plus profondes et touchent aux principes mêmes de notre civilisation, à sa logique et à ses fondements philosophiques… Si la croissance s’évapore, ce sont nos certitudes qui sont ébranlées, notre vision du futur qui change, nos espoirs de bonheur et d’amélioration qui s’évanouissent… Comment pourrions-nous être heureux dans un monde sans croissance ? L'immense majorité de la population ne sait plus répondre à cette angoissante question.

Alors, pour ne surtout pas remettre en question le paradigme de la croissance infinie, les responsables politiques et les acteurs de l'économie ont préféré laisser le crédit exploser, émettre de la monnaie depuis les Banques Centrales afin de maintenir sous perfusion l’économie en y injectant son carburant favori : l’argent.

Force est de constater que ça a bien fonctionné durant des décennies. Mais ce faisant, ils ont "donné les clefs du camion" à la finance qui a prospéré car nous avions besoin d’elle pour maquiller l’évidence, et ne pas abandonner ce qui nous apparaît toujours comme une intangible et sainte vérité…

Dans certains cas, c’est la dette privé qui a compensé le manque de création de valeur et artificiellement soutenu la consommation des ménages comme aux USA, dans d’autres, ce sont les gouvernements eux-mêmes qui ont emprunté au-delà du raisonnable afin de redistribuer de quoi consommer et alimenter la machine, désormais condamnée à la croissance pour rembourser. Or cette croissance n'existe plus, et chaque dollar goulûment absorbé par les dispositifs  ne produit plus suffisamment de valeur (cf graphe ci-contre).

Était-il possible de changer les choses avant d’être piégé dans le cercle vicieux de la dette sans fin ? Était il envisageable de demander aux populations de radicalement changer leurs comportements d’achat, et surtout de renoncer à leurs rêves ? Bien sûr que non ! Car personne n’aurait été élu sur un tel programme.

Alors que la planète incrédule observe les dispositifs dangereusement vaciller, et pour certains s’effondrer, l’heure n’est plus vraiment à la critique du dogme et de ses conséquences bonnes ou mauvaises. Après tout, le  « modèle croissant » a permis de vivre ensemble dans un relatif bonheur durant plusieurs décennies autour d’idées simples, normalisées et largement partagées, c’est peut-être là l’essentiel...

L’objet n’est pas non plus de conspuer le crédit facile, la finance internationale, les technocrates, ou bien de désigner un coupable expiatoire à tout ceci, car nous sommes tous responsables de ce qui arrive. Oui, nous sommes tous définitivement responsables de notre difficulté à imaginer autre chose, et de notre incapacité à sortir de la croissance en tant que théorie politique.

Aujourd’hui, l’usine à rêve est grippée et menace d’exploser. Elle est sous assistance respiratoire, elle ne produit plus grand-chose pour la majorité, condamnée à regarder quelques privilégiés profiter encore des attributs de la réussite qui s’étalent ostensiblement sur des affiches quatre par trois ou dans les magazines fashion. L’écart entre le réel et le « rêve croissant » se creuse jour après jour…

Un peu partout dans le monde, certains expliquent que l’unité de mesure de la réussite d’une civilisation devrait aussi celle des individus qui la compose. Au lieu de cela le PIB est devenu la nouvelle aune planétaire, soumise à l’approbation dédaigneuse d’agences privées partiellement financées par les banques. Pourtant, le PIB ne mesure pas les dégâts sur l’environnement, le revenu moyen par habitant, le bien-être, le niveau d’éducation, la sécurité ou le degré de liberté…

Alors que faire ?

L’histoire de l’humanité nous apprend que des civilisations beaucoup moins globales et planétaires que la notre, n’ont pas su se remettre en question à temps, et ont disparu du fait de leur inadaptation. Cela laisse peu d’espoir pour un sursaut salvateur compte tenu du gigantisme des chaînes de commandement que nous avons généré, et qui n’ont aucun intérêt à se tirer une balle dans le pied tant que leurs salaires sont encore versés. Notre capacité de réforme structurelle est très faible…

Si la réforme éclairée n’est pas possible, certains seront alors tentés de rejoindre ceux qui prônent une révolution encapuchonnée depuis longtemps. Mais il n’y a que dans l’imagerie populaire qu’une révolution peut être conduite par une minorité de gueux armés de lance-pierre. Ils ne feront jamais basculer la majorité qui a depuis longtemps décroché d’une quelconque réflexion politique, ou d’une quelconque capacité à faire autre chose qu’appuyer sur les boutons de la télécommande de leur TV ou bien se ruer sur les soldes… Et puis, comment vivre ensemble après ça ?

Que nous reste t-il alors, si ni l’évolution ni la révolution ne sont possibles ?

Difficile à prévoir, mais il reste peut-être une "troisième voie" car le modèle croissant va vraisemblablement continuer à s’essouffler, faute de moyens pérennes. Il va progressivement s’asphyxier tout seul en l’absence de consommateurs, tel un poisson rouge hors de son bocal. Le phénomène est déjà à l’œuvre en Europe et aux USA où la fin des crédits faciles, l’évaporation de l’épargne des ménages, la délocalisation des usines, la réduction des aides de l’état et l’explosion du chômage conduisent à une dé-consommation forcée.

A moyen terme, le modèle croissant moribond, va vraisemblablement laisser place à un modèle décroissant contraint, car les gens n’auront pas le choix… Cette révolution par défaut, n’a rien d’épique, de réfléchi ou de voulu (bien évidemment). Mais elle s’impose à la majorité, elle va s’installer dans nos vies pour transformer le modèle de manière sectorielle et locale. Des pans entiers de l'industrie, des métiers, des services ont déjà disparus ou vont disparaître, des régions industrielles, des zones géographiques, des quartiers en feront les frais...

Ne nous y trompons pas : ce n’est pas la décroissance en tant que théorie politique minoritaire qui est à l’œuvre aujourd’hui, c’est la décroissance en tant que force universelle. Ce papier n’a rien de militant (ou de politique), il tente simplement de considérer d’un point de vue systémique le phénomène de décroissance, aussi implacable dans sa logique, que l’était la croissance durant plusieurs siècles. Il suffit de regarder la tendance de la croissance depuis les années 1960:



Si l’on admet que la nature s’inscrit dans des cycles de croissance et de décroissance, de création et de destruction, de courbes ascendantes et descendantes, alors on peut aisément imaginer que notre modèle économique ne peut pas être croissant indéfiniment, ne serait-ce que parce que nous vivons dans un monde où les ressources naturelles sont limitées et non renouvelables (Voir à ce propos les travaux de Nicholas Georgescu-Roegen et le concept de bioéconomie - Voir aussi note en bas de page). Et il n'est pas établi non plus que  la découverte de nouvelles énergies, et / ou de nouvelles technologies pourraient  retarder l’avènement naturel de la  décroissance, et indéfiniment prolonger notre fragile apogée tant elle coûte cher en ressources et en gaspillages divers

Si les politiques n’anticipent pas les phénomènes de chômage et de paupérisation déjà l’œuvre, le risque global est très important. Si aucune alternative durable au modèle croissant ne se met progressivement en place pour absorber les milliers, les centaines de milliers puis les millions de personnes qui vont être expurgées des dispositifs d’aide, alors nous risquons de faire face à des situations qui pourraient être dramatiques.

Nous constatons déjà les conséquences de l’arrivée non préparée de la décroissance et de la désurbanisation en Grèce… Le modèle planétaire ne fonctionne plus là bas, et ne permet plus d'honorer les échéances depuis longtemps. On s’acharne pourtant à le sauver, quel qu’en soit le coût, en affectant l'intégralité des aides BCE au remboursement de la dette,  qui génère elle-même une nouvelle dette ! La Grèce ne produisant rien qui puisse lui permettre de rembourser quoi que ce soit, on diffère l'issue fatale et on augmente potentiellement l'onde de choc. Quant à l'avenir...

Dans un monde idéal, il faudrait éviter que la décroissance ne s’impose à nous comme une force destructrice et incontrôlée. Il faudrait construire de nouvelles alternatives, anticiper un changement de modèle progressif sans avoir la prétention de tout refaire du sol au plafond en voulant régler la question en un jour…

Malheureusement, ce monde des bisounours n’existe pas, et on élit toujours les leaders qui affirment détenir une solution globale pour aujourd'hui. Quel leader se ferait élire en osant avouer qu’il n’a pas la solution dans l'immédiat, mais que collectivement il sait que nous pouvons la trouver demain ? Quel homme politique pourrait se faire élire en expliquant qu’il va falloir inventer localement et explorer, tout en remettant en question nos certitudes les plus essentielles et la branche sur laquelle il est assis ?

La décroissance risque encore de s’imposer avec force et violence, car nous semblons préférer tous les remèdes, mêmes les pires, plutôt que de remettre en question le dogme. « Une bonne guerre » pour tout casser et ensuite tout reconstruire à l’identique, diront certains… Cette alternative préférée de l’histoire, traduit effectivement notre triste incapacité collective à sortir des schémas, et à sans cesse reproduire les mêmes erreurs.

Aujourd’hui, nous sommes face à une situation qui implique une adaptation de notre part,  une remise en question constructive et progressive... Nous devons nous adapter au changement de cycle, nous devons tenir compte du fait que la croissance ne permet plus  de vivre ensemble, et que la décroissance non préparée risque de s’imposer un peu partout dans le monde qu'on le veuille ou non.

Il ne s’agit pas d’une certitude absolue, mais plutôt d’une intuition. Celle qu’il est encore temps de coordonner les modèles croissant et décroissant, de favoriser une transition d’un monde, où certains problèmes peuvent encore être réglés globalement, vers un monde résilient où des solutions apparaissent, ou apparaîtront localement au niveau des individus... Il serait peut-être utile (et peu coûteux) de faciliter dès aujourd'hui la mise en oeuvre des initiatives locales, de mettre en place une fiscalité rurale incitative, de déployer une nouvelle architecture politique moins centralisée et plus adaptée aux enjeux de demain. Mais je ne vois nulle trace de telles propositions sacrilèges dans les discours politiques...
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Note: Nicholas Georgescu-Roegen : économiste mathématicien en marge de la pensée économique dominante, a fondé sa pensée sur la thermodynamique, notamment sur sa seconde loi, l'entropie, ou loi de dissipation. Il s'est beaucoup inspiré de la théorie de l'évolution de Darwin, décrivant le développement de la technologie comme le prolongement de l'évolution biologique de l'espèce humaine. Ceci l'amènera à créer le concept de bioéconomie. La prise en compte de l'entropie implique que l'économie doit être vue comme un système biologique, avec les contraintes qui affectent tout système vivant. Georgescu-Roegen démontre avec la rigueur du mathématicien que la recherche d'un état stationnaire pour l'économie actuelle n'est pas soutenable. La seule issue - conclusion qui n'est pas facile à entendre - est la décroissance. Georgescu-Roegen est sans appel: le système économique du 19è siècle dans lequel nous vivons aujourd'hui est une fiction qui est vouée à s'écrouler. Source 

mercredi 11 juin 2014

L'édito de Charles SANNAT, "Le Contrarien Matin"

C'est avec beaucoup de plaisir que j'ai découvert l'édito de ce jour sur le blog de Charles Sannat : "Le Contrarien Matin".

Pour ceux qui ne le connaissent pas encore, Charles Sannat décortique quotidiennement au gré de ses humeurs l'actualité et apporte un éclairage assez décapant sur le monde qui nous entoure.

C'est souvent très drôle, pertinent et rejoint quelques thèmes abordés de manière romancée dans "Vicilisation - La Chute" (le déclin du consumérisme, la perte des repères, l'inévitable "décroissance", les solutions de vie pour le monde post-industriel, l'architecture, le modèle social de demain, les circuits courts...etc).

C'est sans doute la raison pour laquelle Charles Sannat a intitulé sa chronique d'aujourd'hui: "De la Civilisation à la Vicilisation!", faisant référence au roman de votre serviteur. Bonne lecture à tous...

" Vicilisation - La Chute" Edito de Charles Sannat

Edit 30/03: Retrouvez Charles Sannat sur http://insolentiae.com/

lundi 2 juin 2014

L'avis des lecteurs...

 
"On a tout simplement envie de lire la suite et de tourner chaque page ! J’ai passé un bon moment de lecture et cet ouvrage doit nous amener à nous poser quelques questions de fond, en tout cas il peut sans conteste servir de support à une réflexion beaucoup plus large sur notre modèle de civilisation".

"Un roman qui fait réfléchir est une denrée rare, de même qu’un roman de SF qui parvient à innover, ce qui n’est plus si courant." Lire la suite...
"Une très bonne lecture, un livre et un auteur à découvrir sans hésitation !" Lire la suite...
"La principale force du livre est de décrire un modèle intelligent, crédible, mais surtout humain." Lire la suite...
"Ce roman est captivant du début à la fin, je me suis régalée" Lire la suite...
" J'ai adoré" Lire la suite...

"Un récit palpitant qui se lit très facilement." Lire la suite...
"Un très beau premier essai littéraire de Chris Antone" Lire la suite...
"La chute du monde moderne comme si vous y étiez..." Lire la suite...

mercredi 19 février 2014

Article sur Vicilisation dans Try Me Luxury

Article Vicilisation dans TRY ME
Le magazine TRY ME s’est associé au projet Bookstory et présente le roman Vicilisation - La Chute cette semaine.

vendredi 29 novembre 2013

Globalisation ou relocalisation ?

La mondialisation implique une course sans fin aux coûts les plus bas. La globalisation des marchés accroît la concurrence, exacerbe les disparités compétitives géographiques, et fait fondre les marges, donc à terme, les emplois des zones moins compétitives.

A quoi bon chercher à produire des biens moins chers à l’autre bout de la planète, si personne ne peut plus les acheter, même à crédit ? (Sans compter les impacts en terme d'acheminement)

Une analyse intéressante nous est livrée dans «The price of inequality» (aux éditions Norton ) par Joseph Stiglitz, prix Nobel d'économie sur les effets de la mondialisation.

Les remèdes préconisés semblent plus interventionnistes, monétaires et étatiques. Mais lorsque l’on demande à un économiste de proposer des solutions pour demain, il ne faut pas s'étonner d'obtenir des réponses mécanistes et systémiques et, le plus souvent, orthodoxes...

Alors soyons iconoclastes, et lançons une idée folle : si la concentration de la production de ces 50 dernières années a finalement conduit à inexorablement détruire de la valeur et des emplois, que se passerait-il si les gouvernements favorisaient la déconcentration et la relocalisation vers lieux de production plus atomisés sur le territoire national ?

Que se passerait-il si, un arsenal légal, fiscal, juridique permettait de stimuler la création, non pas de concentrations industrielles recherchant l'optimisation maximale pour survivre, mais au contraire de sites de production volontairement « redondants », régionaux, délivrant localement les biens manufacturés sur place ?

lundi 14 octobre 2013

Quand les subprimes et le futur krach obligataire nous inspirent...


Ce fut une onde de choc. Elle arriva d’abord des USA en 2008 et enfin de toutes les directions, depuis toutes les places mondiales. S’entrelaçant en vagues complexes, répercutant et amplifiant des phénomènes anodins, rasant des millions emplois d’un revers de la main, expropriant des familles et détruisant les espoirs d’avenir.

Le grand public incrédule découvrit alors pour la première fois les conséquences de décennies d’abus financiers, l’explosion des subprimes et l’endettement à peine concevable de la plupart des pays modernes vivant à crédit afin de prolonger l’illusion du modèle planétaire jusqu’aux prochaines élections.

Pour l’homme de la rue, encore bercé aux illusions d’une glorieuse croissance sans fin, la prise de conscience fut rude et peut-être salutaire pour certains . Elle marque sans doute un tournant dans l’appréhension de notre avenir. Une sorte d’électrochoc, capable de faire évoluer les perceptions et de faire bouger les lignes, car une onde de choc précède toujours une explosion. Peut-être celle du modèle néo-libéral et du paradigme  d'une modernité sans limite ?

Cette révélation fut le déclencheur de l’écriture de « Vicilisation – La Chute », avec l’envie d’explorer de manière romanesque et ludique l’hypothèse d’une aggravation de la crise mondiale actuelle en suivant les aventures d’un jeune architecte emporté dans le tourbillon d’une explosion économique et sociale.  C'est peut-être la fin du monde tel que nous le connaissons, mais ce n'est pas la fin du monde pour autant...

jeudi 17 janvier 2013

"Vicilisation - La Chute" gagnant du concours littéraire Book Story !!

"Vicilisation - La Chute" vient de remporter le concours littéraire organisé par BookStory, première plateforme de social reading en France. 

Le roman est désormais disponible en téléchargement au format ebook chez Bookstory qui innove dans son approche en permettant non seulement aux internautes d'échanger des avis et de dialoguer avec l'auteur, mais aussi de proposer les romans plébiscités par les lecteurs aux maisons d'éditions "classiques".

Les 10 premiers exemplaires en téléchargement sont gratuits !!!

Alors cliquez vite sur ce lien pour télécharger gratuitement "VICILISATION - La Chute", et surtout n'oubliez pas de donner votre avis.


Les deux tomes de Vicilisation sont sur le podium des ventes chez Amazon !

 "La Chute" (Tome 1) et "Refondation" (Tome 2) sont classés dans le Top 3 des meilleures ventes sur Amazon. Les deux rom...