samedi 2 janvier 2021

Apprendre à vivre avec l´incertitude ou secrètement espérer continuer à acheter des certitudes ?

Est-ce un effondrement temporaire ou durable ? Les nombreuses interrogations à ce sujet révèlent aussi en arrière-plan un questionnement existentiel sur le futur format de l´après-crise alors que certains fondements philosophiques et sociétaux sont bousculés, levant le voile sur d´autres possibles. 


En d´autres termes, si cette crise est temporaire, allons-nous reprendre notre vie « comme avant » et continuer à tranquillement acheter des certitudes dans un monde plat et prévisible ? Continuerons-nous à faire des compromis notamment sur nos libertés, nos choix et sur l´impact de notre consommation frénétique sur la planète ? C´est le prix que nous étions (in)consciemment prêt à payer pour aplanir les incertitudes et évoluer avec un horizon temporel long, rassurant et relativement prévisible, dont nous ne pouvions cependant pas feindre d´ignorer la létalité sur le long terme. 

Ou bien allons-nous devoir (sur)vivre dans une crise durable et nous adapter à un nouveau monde dont les contours ne sont pas encore bien définis, mais dont l´incertitude et l´opportunité de repenser seront les caractéristiques ? Combien seront capables de s´en accommoder ? Car avec les aléas sanitaires, économiques, financiers qui continuent de se renforcer, nous passons à une logique de court terme, de gestion de crise et de plans d´urgence permettant de progresser uniquement de crêtes en crêtes sans vraiment voir ce qui nous attend.

Avec cette crise globale du Covid-19, nous passons d´un paysage connu de plaines à perte de vue, à un paysage montagneux se découvrant derrière chaque escarpement. Notre tendance naturelle pour les habitudes pourrait nous faire regretter le doux compromis des plaines, offrant une vision à 360 degrés sur le monde environnant, à celui d´un monde à découvrir fait d´horizons plus proches rendant difficile la planification.

Nous expérimentons déjà la contraction de l´espace et du temps. Sans les avions, le monde s´est rétracté devenant moins accessible d´un simple vol low-cost. Se déplacer d´un point à l ´autre de la planète n´est plus aussi simple qu´auparavant et sera sans doute compliqué (et coûteux) durant un moment.

Le temps, lui aussi est impacté. En quelques mois à peine, nous sommes passé de la planification à moyen ou long terme, à la prise de décision à court terme et à la navigation à vue pour tous. Sans conviction et imagination, il devient compliqué de faire des plans se déroulant sur de longues périodes, alors que notre modèle est notamment basé sur la gestion d´aléas acceptables. 

Le capitalisme tout entier est conditionné par l´espérance de gains futurs dans un mode plat et contrôlé. Si personne n´est capable de prévoir le monde de demain, qui va risquer d´accompagner la moindre initiative ? Supprimer la certitude, ce n´est pas seulement supprimer nos prochaines vacances d´été à Paimpol les Oies ou à Disneyland, c´est surtout priver nos gigantesques infrastructures de leurs fondamentaux basés sur la prévision. Je ne parle pas ici de l´anticipation de la simple commande massive de masques, de surblouses, de respirateurs, de vaccins, je parle de l´incapacité fondamentale de notre modèle occidental à évoluer en l´absence de certitude, même psalmodiées. D´autres modèles sont plus résilients et s´accommodent de l´incertitude.

La mondialisation montre ici ses limites. Une OMS réduite à comptabiliser les morts sur une belle carte interactive, mais incapable d´assumer son rôle de prévention, d´information, de préparation et de coordination que l´on attendait d´elle. Une Europe, mettant des semaines à coordonner ses membres récalcitrants et décidant finalement en désespoir de cause de faire "Tapis" en injectant 500 milliards d´euros dans le tonneau des Danaïdes. Des Banques Centrales contraintes d´alimenter, elles aussi, le zombie économique pour tenter de calmer ses spasmes terminaux sans pouvoir vraiment se poser la question de sa pertinence. Mais que faire d´autre, à part poursuivre la logique jusque dans ses ultimes retranchements ? Voilà le spectacle auquel nous assistons, alors que les saintes alliances globales se délitent rapidement, que des chaînes de production mondialisées se retrouvent sans pièces et que les complémentarités du profit et de la délocalisation s´évaporent. 

Nous passons d´un modèle global en expansion du fait de la profusion des options sur étagère, à un nouveau paradigme qui pourrait être local et en contraction par nécessité et réduction massive des alternatives. Une sorte de mouvement de l´histoire répondant aussi aux lois de la physique élémentaire énonçant qu´un phénomène d´expansion est suivi d´une contraction. Une sorte de « Big Crunch » cosmologique démontrant qu´une expansion ne peut pas être infinie et qu´elle est toujours suivi d´un mouvement de contraction, suivi de nouveau d´une expansion, et ce, sans doute de manière infinie. L´humanité échapperait-elle aux règles de l´univers ? Du fait de son indéniable supériorité intellectuelle, serait-elle au-dessus des lois d´une nature sifflant la fin de la récréation avec un simple virus de quelques microns ? 

Je ne pense pas, alors n´ayons pas peur des découvertes qui se profilent, n´ayons pas peur de ce risque, car il peut révéler des opportunités. L´opportunité de réinventer face aux dangers, versus accepter moins de liberté en contrepartie d´un illusoire et parfois superflu confort. Observons ce que le monde global en expansion va bien pouvoir inventer pour tenter de freiner sa chute vers l´inéluctable local.


Gageons que l´avènement de ce local forcé, voulu par certains et subi par d´autres, permettra néanmoins de réinventer une expansion raisonnée, non pas sur une néo-ruralité idéalisée, mais sur un modèle hybride prenant le meilleur des deux paradigmes. Alors, est-ce que ça va durer ?

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